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2021-07-01 Articles

Début de carrière? Adoptez dès maintenant de saines habitudes en gestion des risques

1er juillet 2021

Aucun avocat n’est à l’abri d’une poursuite en responsabilité professionnelle! Cela dit, à titre de jeune avocat, peut-être croyez-vous être plus vulnérable? Détrompez-vous! Les avocats séniors sont aussi susceptibles que leurs collègues juniors d’être l’objet d’une réclamation ou d’une poursuite en responsabilité professionnelle.

Par ailleurs, les réclamations ou les poursuites contre les jeunes avocats n’impliquent pas nécessairement un manque de connaissances juridiques, au contraire! La plupart du temps, les reproches à l’encontre des avocats, qu’ils soient juniors ou pas, découlent de lacunes dans la gestion de leur pratique. Or, le début de carrière est le moment propice pour développer des compétences et des habitudes permettant d’avoir une pratique plus sereine. Voici nos suggestions :

Adoptez des compétences en gestion du temps

Tout d’abord, dotez-vous d’un système d’agenda comportant les trois (3) catégories de dates suivantes : la révision périodique des dossiers, les délais de prescription et autres délais de déchéance ainsi que les rencontres et les vacations à la Cour.

Assurez-vous que les dates importantes sont inscrites dans deux (2) registres distincts, tenus par deux (2) personnes différentes (Ex : L’avocat et l’adjointe).

De même, votre système d’agenda devrait vous rappeler suffisamment à l’avance les dates importantes afin de réagir en cas d’imprévus.

Vérifiez et revérifiez le délai de prescription applicable. À cet égard, l’équipe de prévention du Fonds d’assurance a publié sur le site Web dans la section Guide et outils, un tableau intitulé Prescriptions extinctives et autres délais à titre d’aide-mémoire, rappelant ainsi plusieurs dates de prescription, de déchéance et de préavis.

Enfin, combattez la procrastination! Le dossier est complexe? Le client est difficile? Quelle qu’en soit la raison, remettre à plus tard le travail à effectuer comporte le risque d’échapper un délai ou de mener à l’insatisfaction du client. N’hésitez pas à consulter notre article Vaincre la procrastination : Quelques astuces pour vous défaire de cette mauvaise habitude.

Gérez votre charge de travail 

De manière corollaire, notre seconde suggestion est d’apprendre à gérer sa charge de travail. Ceci implique de planifier de manière hebdomadaire les tâches à effectuer. Une des stratégies de planification est d’organiser vos tâches à l’aide de la matrice du Général Dwight David Eisenhower qui classifie ces dernières en fonction de leur urgence et de leur importance. Pour de plus amples informations concernant l’utilisation de cette matrice, consultez l’article intitulé La précrastination : Connaissez-vous?.

De plus, apprenez à dire « non ». En début de carrière, il n’est pas toujours facile de refuser un mandat. Cependant, lorsqu’un avocat est surchargé, c’est souvent la qualité du travail qui en pâtit. Aussi, tout en rassurant vos collègues quant à votre flexibilité et votre disponibilité, expliquez-leur qu’une bonne gestion de votre charge de travail est bénéfique pour maintenir de hauts standards de qualité. 

Acquérez de solides habitudes en communication 

Les relations avec le client sont parmi les causes les plus fréquentes de réclamations nonobstant le nombre d’années de pratique.

Ainsi, il importe de bien gérer les attentes du client. Soyez prudent lorsque vous discutez des chances de succès du dossier. La transparence s’impose! Il faut informer le client de tous les aspects du dossier, les bons comme les moins bons. Discutez également des délais et des honoraires pour mener à terme le mandat. Par la suite, informez régulièrement le client des développements dans le dossier.

D’ailleurs, nous ne saurions trop insister sur l’importance de mettre par écrit vos conseils, recommandations, décisions stratégiques retenues dans le dossier ainsi que les conseils écartés par le client. Il en va de même pour les offres de règlement. En effet, en l’absence d’écrit, si vous êtes poursuivi, le bien-fondé du dossier repose alors sur la crédibilité des parties. Or, ce n’est pas parce que vous êtes avocat que votre version sera nécessairement retenue par le Tribunal si vous n’avez pas d’écrits pour supporter vos prétentions.

Enfin, gardez à l’esprit que pour votre client son dossier est important et peut susciter de vives émotions. Faites preuve de disponibilité et pratiquez l’écoute active.

Sélectionnez adéquatement votre clientèle  

L’un des défis en début de carrière est de se bâtir une clientèle. Il peut donc être tentant d’accepter tout nouveau client qui se présente devant votre porte. Cela dit, avant d’accepter un nouveau client, deux (2) questions s’imposent :

  • Possédez-vous les compétences pour mener à bien le mandat? Trop souvent, des erreurs surviennent parce que l’avocat n’a pas respecté certaines formalités propres à un domaine de droit particulier. Aussi, évitez d’accepter un mandat dans un domaine qui vous est peu familier.
  • Devriez-vous accepter le mandat? Certains dossiers sont intéressants juridiquement, mais la personnalité du client peut rendre leur gestion plus complexe. Certains signaux permettent de déceler les clients aux personnalités difficiles. À ce sujet, consultez l’article Relations entre avocat et client qui permettra également d’orienter votre réflexion avant d’accepter de représenter un client à la personnalité difficile.

Ouvrez et fermez correctement vos dossiers 

Une fois le mandat accepté, assurez-vous de faire signer une lettre-mandat à votre client. Cette lettre-mandat devrait notamment identifier le client, la nature et l’étendue du mandat confié ainsi que ce qui en est spécifiquement exclu. En fait, ce document permet de dénouer plusieurs malentendus relativement à ce qui devait être accompli et par qui.

De même, à la fin d’un mandat, transmettez une courte lettre à votre client précisant ce qui a été réalisé, une référence aux documents retournés et les gestes additionnels à poser pour préserver ses droits, le cas échéant. Évidemment, prenez soin de conserver une copie du dossier puisqu’il s’agit de votre meilleur allié si vous êtes poursuivi en responsabilité professionnelle.

Pour conclure sur le sujet, vous pouvez consulter l’Aide-mémoire : Survol des principaux éléments à documenter pour vous aider dans la rédaction de vos lettres-mandats et de fin de mandat. 

Faites une enquête adéquate pour chaque dossier 

Prenez le temps de couvrir tous les aspects pertinents du dossier en posant les bonnes questions au client. Veillez à bien cerner ses objectifs. Cela implique d’être capable de « lire entre les lignes » et de reformuler les propos du client.

Une enquête adéquate se manifeste également dans le fait de retenir un expert si nécessaire ou d’identifier l’expert adéquat pour remplir son fardeau de preuve.

Dans tous les cas, l’outil indispensable pour mener une bonne enquête demeure votre théorie de la cause. Consacrez-y tout le temps nécessaire puisqu’elle vous permettra d’éviter bien des surprises et des pertes de temps en cours de mandat pour rectifier des erreurs ou omissions. 

Posez des questions et demandez à être supervisé 

Vous avez des doutes sur la stratégie à adopter dans un dossier ou sur le droit applicable? N’hésitez pas à poser des questions à un avocat plus expérimenté. Cela permet de dénouer des impasses et vous assure d’offrir un service de qualité à vos clients.

Dans cette veine, il est souhaitable d’avoir un mentor qui peut vous guider autant sur des questions de droit que sur la gestion de votre pratique. Bénéficier des conseils d’un avocat expérimenté permet d’accélérer l’acquisition de connaissances et de compétences, qui autrement, pourraient prendre des années à acquérir. Alors, pourquoi s’en priver?

En terminant, faire l’objet d’une poursuite en responsabilité professionnelle vient avec son lot d’inconvénients : atteinte à la réputation, stress et temps considérable consacré à assister l’avocat mandaté pour assurer sa défense. En adoptant ces quelques mesures préventives, vous limiterez donc les risques d’être poursuivi.

 

Références :

April A. Otterberg, “Ethical traps for young lawyers”, dans Los Angeles Daily Journal, 2 janvier 2015, en ligne :

https://jenner.com/system/assets/publications/13813/original/Otterberg_DJ_1_2_15.pdf?1420460396.

Ian Hu, “Young Lawyers: Build Good Practice Habits and Avoid Malpractice Claims”, dans Law Practice Today, 14 avril 2017, en ligne :

https://www.lawpracticetoday.org/article/young-lawyers-build-good-practice-habits-and-avoid-malpractice-claims/.

Tim Lemieux, “Common practice pitfalls: How to avoid them” dans LawPRO Magazine Special Student Edition, 2017, numéro 5, en ligne :

https://www.practicepro.ca/wp-content/uploads/2017/06/2017-01-common-practice-pitfalls-2017-student-version.pdf.