Par un beau vendredi matin, nous donnions la conférence Ces avocats qui en font trop et leur bien-être psychologique. À la fin de la formation, un participant a partagé avec notre groupe une pratique adoptée depuis plusieurs années, soit la tenue d’un journal de bord. Cette pratique consistant à documenter nos pensées, nos émotions, nos expériences et nos observations[1] lui permettait de maintenir un équilibre entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle.

Au vu de ce qui précède, nous nous sommes demandées si les bienfaits de l’écriture d’un journal pouvaient s’étendre à la prévention des réclamations en responsabilité professionnelle. Nous pensons que oui.

Ainsi, voici quelques avantages à la tenue d’un journal en matière de prévention des réclamations :

• Identifier nos erreurs et réfléchir sur la manière d’éviter qu’elles ne se reproduisent. Prenons l’exemple d’Agathe, une avocate d’expérience. Récemment, elle a manqué plusieurs échéances dans ses dossiers. Elle s’interroge à savoir si ses déboires sont le fruit de malencontreux oublis ou la manifestation d’une problématique plus importante. Elle couche par écrit ses réflexions. Il en ressort qu’elle est surchargée de travail et « n’éteint que des feux ». D’ailleurs, ces urgences sont le résultat du report de plusieurs tâches en raison du manque de temps. À la suite de cette réflexion, elle adopte les changements suivants : Demander de l’aide à un collègue pour certains dossiers, refuser certains mandats afin de mener à terme des dossiers existants et délaisser des activités personnelles et professionnelles ayant peu de valeur ajoutée.

• Réviser des apprentissages, consolider de nouveaux concepts et maintenir à jour nos connaissances. Paul assiste à une conférence en matière de prévention des poursuites en responsabilité professionnelle. À la fin de cette dernière, il prend quelques minutes pour noter la manière d’intégrer certaines mesures préventives dans sa pratique.

• Réfléchir sur la qualité de nos relations professionnelles. Certains collègues et clients nous stimulent alors que d’autres nous sapent le moral en se montrant toujours insatisfaits. Écrire un journal permet de prendre du recul et de nous interroger sur le maintien de ces relations. De même, cela pourrait fournir des pistes de réflexion afin d’être plus rigoureux dans le choix de notre clientèle.

• Limiter la fatigue décisionnelle. Lors d’une conférence Ted^x Yale, Ryder Carroll, l’inventeur d’un système de prise de notes hyperorganisé, présente l’écriture d’un journal comme un moyen de désencombrer son esprit. Dans le cadre de cette conférence, M. Caroll mentionne que des études ont montré que nous avions 500 000 pensées par jour. Plusieurs d’entre elles nécessitent une prise de décision, ce qui peut conduire à de la fatigue décisionnelle. Or, nous l’avons abordé dans un article du Bulletin Praeventio, la fatigue décisionnelle nous rend vulnérables à la prise de mauvaises décisions. Sous le coup de cette fatigue, nous avons tendance à prendre des décisions impulsivement ou au contraire, à éviter de faire des choix. Aussi, pour M. Carroll, coucher nos réflexions par écrit limiterait la fatigue décisionnelle en permettant de cerner ce qui est vital ou important, le reste n’étant que distraction. Autrement dit, tenir un journal permet de faire un choix éclairé quant à la manière d’investir notre temps et notre énergie.

• Améliorer nos compétences en communication. Évidemment, la tenue d’un journal met à profit nos compétences en matière de communication écrite. Mettre par écrit nos idées et nos émotions permet de préciser nos pensées pour ensuite les exprimer plus clairement.

• Documenter les conseils de nos mentors. Certaines personnes dans notre carrière nous transmettent de la rétroaction et des conseils d’une valeur inestimable. En écrivant ces derniers, nous pourrons nous y référer lorsque nous serons confrontés à un problème ou chercherons de l’inspiration. 

En terminant, tenir un journal comporte de nombreux bienfaits en matière de prévention des réclamations en responsabilité professionnelle. Alors, n’attendons plus, sortons notre papier et nos crayons!

 

Références 

Pat Snyder, Why Journaling Can Make You A Better Lawyer, LinkedIn, 11 avril 2019 : https://www.linkedin.com/pulse/why-journaling-can-make-you-better-lawyer-pat-snyder?trk=public_profile_article_view. 

Hailey Reissman, How to declutter your mind, TEDEd, TED-Ed Blog, 14 octobre 2019 : https://blog.ed.ted.com/2019/10/14/how-to-declutter-your-mind/.

The Muse, 6 Ways Keeping a Journal Can Help Your Career, Forbes, Leadership, 18 juillet 2012 : https://www.forbes.com/sites/dailymuse/2012/07/18/6-ways-keeping-a-journal-can-help-your-career/?sh=7c0856177499.

Mind Tools Content Team, Journaling for Professional Development – Improving Yourself Through Reflection, MindTools : https://www.mindtools.com/a1dme2h/journaling-for-professional-development.

Ryder Carroll, How to declutter your mind -- keep a journal, TED^x Yale, 20 janvier 2017 : https://www.youtube.com/watch?v=ym6OYelD5fA.

[1] Mind Tools Content Team, Journaling for Professional Development – Improving Yourself Through Reflection, MindTools : https://www.mindtools.com/a1dme2h/journaling-for-professional-development; The Muse, 6 Ways Keeping a Journal Can Help Your Career, Forbes, Leadership, 18 juillet 2012 : https://www.forbes.com/sites/dailymuse/2012/07/18/6-ways-keeping-a-journal-can-help-your-career/?sh=7c0856177499.