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2023-09-01 Articles

Marika et la demande d’inscription pour instruction et jugement : Un voyage risqué!

1er septembre 2023

Depuis plusieurs mois, Marika est aux prises avec un dossier litigieux mettant en cause la responsabilité d’un restaurant devant lequel sa cliente, madame Lamarche, est tombée en sortant de celui-ci.

Malheureusement, ce dossier ne se déroule pas sans encombre. Il a fallu attendre plus de deux mois après la signification de l’avis d’assignation pour que le protocole de l’instance soit négocié, puis déposé au dossier de la Cour.

Marika ayant été débordée de travail ces dernières semaines et pilotant ce dossier depuis cinq mois et demi, décide de prendre un peu de repos. Elle partira dans 10 jours pour un voyage de trois semaines en Asie.

Elle planifie déposer au greffe la demande d’inscription pour instruction et jugement à son retour de vacances, dans le dossier de sa cliente.

Avant son départ, Marika rencontre une de ses collègues de bureau, Me Léveillé, qui veillera sur ses dossiers en son absence.

Quelle n’est pas la surprise de Me Léveillé en feuilletant le dossier de madame Lamarche! Après avoir regardé les dates importantes figurant au dossier, elle informe immédiatement Marika que si elle dépose la demande d’inscription pour instruction et jugement à son retour de vacances, dans un peu plus de trois semaines, sa cliente sera réputée s’être désistée de sa demande en vertu de l’article 177 alinéa 1 du Code de procédure civile[1] (« C.p.c. ») qui énonce :

« Faute de demander l’inscription dans le délai de rigueur, le demandeur est présumé s’être désisté de sa demande à moins qu’une autre partie n’ait demandé l’inscription dans les 30 jours de l’expiration du délai. »

En effet, considérant qu’il a fallu plus de deux mois après la signification de l’avis d’assignation pour que le protocole de l’instance soit déposé au dossier de la Cour (le protocole n’a donc pas été déposé dans les 45 jours de cette signification[2]), le délai de six mois pour déposer au greffe la demande d’inscription est comptabilisé depuis la signification de la demande introductive d’instance conformément à l’article 173 alinéa 3 C.p.c. Il ne faut donc pas calculer ce délai de six mois à partir de la date où le protocole de l’instance est présumé accepté, considérant le retard dans son dépôt au greffe.

L’article 173 alinéa 3 C.p.c. indique :

« Si les parties ou le demandeur n’ont pas déposé le protocole de l’instance ou la proposition de protocole dans le délai imparti de 45 jours ou de trois mois, le délai de six mois ou d’un an se calcule depuis la signification de la demande. Le tribunal ne peut alors prolonger ce délai que si l’une ou l’autre des parties était en fait dans l’impossibilité d’agir. »

Grâce aux recommandations de Me Léveillé, Marika procèdera, dans le délai de rigueur prévu au C.p.c., au dépôt au greffe de la demande d’inscription pour instruction et jugement, évitant ainsi bien des soucis à sa cliente et une potentielle réclamation en responsabilité professionnelle à son encontre puisque le recours de Madame Lamarche serait prescrit s’il devait être intenté de nouveau, aujourd’hui.

Il est important de noter que le non-respect des délais est la seconde faute la plus reprochée aux avocats en responsabilité professionnelle, tout domaine de droit confondu, au cours des cinq dernières années (1er janvier 2018 au 31 décembre 2022) représentant ainsi 14,3 % des réclamations transmises au Fonds d’assurance pendant cette période.

En conclusion, une attention particulière doit être portée aux délais de rigueur, comme nous le rappelle cette locution latine : « Tempus fugit [3]»

 

[1] Code de procédure civile, RLRQ., c. 25.01, art.177.

[2] Id., voir notamment l’article 149.

[3] Le temps fuit (notre traduction)